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Qu’un penser de ce genre adoncques ne circule
Entre vous, commensaux ; ce serait ridicule. »

L’héritier de Polybe, Eurymaque, répond :
« Pénélope Icaride, ô reine de nos âmes,
Nul ne pense indûment qu’il veuille t’épouser ;
Mais on tremble aux brocards des hommes et des femmes.
Quelque minable Grec pourrait ainsi jaser :
Qu’infimes sont ces gens qui briguent la compagne
D’un guerrier ! ils n’ont su bander son arc lustreux,
Tandis qu’un mendiant, venu de la campagne,
L’a dominé sans peine, a traversé les creux.
— Ce langage public nous couvrirait de honte. »

La ferme Pénélope incontinent repart :
« Eurymaque, jamais la louange ne monte
Vers ceux qui, l’outrageant, pillent de part en part
La maison d’un héros. Pourquoi tant de bassesse ?
Quant à ce pérégrin, il est grand, bien tourné,
Et d’un père fameux se brave d’être né.
Donc prêtez-lui l’arc rude, et voyons son adresse.
Car, je vous le promets, et du coup je le tiens :
S’il tend l’arc, si Phœbus lui donne cette gloire,
Je lui baille un chiton, un manteau méritoire,
Un javelot, terreur des hommes et des chiens,
Plus un glaive à deux fils, d’élégantes chaussures,
Et je le fais conduire où bon lui semblera. »

Télémaque, en réponse à ces larges mesures :
« Ma mère, seul des Grecs, et comme il me plaira,
J’ai le droit d’accorder ou d’ôter l’arc rigide.
Ni les princes d’Ithaque au terroir épineux,