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Minerve cependant ne cessait d’agiter
La langue des intrus, pour mieux surexciter
Les longs ressentiments d’Ulysse Laërtide.
L’héritier de Polybe, Eurymaque, soudain
Dit pour narguer Ulysse et ranimer la fête :
« Écoutez, poursuiveurs d’une reine parfaite,
Ce qui présentement déborde de mon sein.
Cet homme sans les dieux ne vint au toit d’Ulysse ;
Son cap me semble luire à l’égal des flambeaux,
Car le moindre cheveu n’estompe son cuir lisse. »
Ensuite interpellant le roi, donneur d’assauts :
« Forain, te plairait-il, sûr d’une bonne paie,
De me servir au bout de ma propriété,
Pour tailler les buissons, repeupler la futaie ?
Tu recevrais de moi vivres en quantité,
Solides vêtements, chaussures confortables.
Mais comme tu n’appris qu’à te croiser les bras,
L’ouvrage te fait peur, et tu préféreras
Mendier pour nourrir tes boyaux implacables. »

Le héros répondit, invincible toujours :
« Eurymaque, en un pré si nous luttions de zèle,
Durant le renouveau, quand s’étirent les jours,
L’un et l’autre pourvus d’une faulx peu rebelle,
On saurait qui des deux fait le plus de travail,
En jeûnant jusqu’au soir, tant que ne faudrait l’herbe.
Si nous guidions des bœufs, l’élite d’un bétail,
Roussâtres, bien repus, d’encolure superbe,
Égaux en âge, en force, et vifs à l’aiguillon ;
Qu’on eût là quatre arpents, le soc rasant la terre,
Tu dirais si je peux tracer droit un sillon.
D’autre part, si Kronide allumait une guerre