L’époux qui lui plaira, par son père amené.
Que si longtemps encore elle veut nous offendre,
Se fiant dans son âme aux beaux dons d’Athéné,
À son aiguille instruite, à ses façons traîtresses
(Rien de tel ne s’est dit des femmes d’autrefois,
De ces Grecques d’élite, aux magnifiques tresses,
Comme Alcmène, Tyro, Mycène, enfant de rois ;
Nulle en habileté n’égalait Pénélope),
Sache qu’elle exécute un funeste dessein.
Car sur tes biens, ton or, s’abattra notre essaim,
Tant qu’elle nourrira ce penchant misanthrope
Que lui soufflent les dieux. Si son nom brille ainsi,
Toi, tu regretteras ta fortune soustraite.
Nous n’irons dans nos champs, dans aucune retraite,
Avant qu’un époux grec soit par elle choisi. »
En ces mots répliqua le prudent Télémaque :
« Antine, je ne puis de moi-même expulser
Celle qui me conçut, m’éleva : loin d’Ithaque
Ulysse est mort, ou vit ; comment indemniser
Icare, si j’allais congédier sa fille ?
Outre mon père, un dieu bientôt me punirait.
En quittant la maison, ma mère attesterait
L’implacable Érinnye ; enfin chaque famille
M’aurait en haine : aussi ne dirai-je ces mots.
Si vos prétentions ne sont pas satisfaites,
Sortez de mon palais. Préparez d’autres fêtes,
Vous ruinant ensemble en vos propres enclos.
Mais si vous estimez plus doux et plus pratique
De consumer d’un seul tout le matériel,
Faites-le : quant à moi, j’invoquerai le ciel,
Afin que, châtiant votre œuvre despotique,
Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/37
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