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J’eus moi-même autrefois des époques prospères ;
Mais, prenant pour rempart mon auteur et mes frères,
Fort et vain, je commis plus d’un acte odieux.
Aussi qu’en aucun cas on ne se montre injuste,
Et qu’on sache accepter tout ce qui vient d’en haut.
Je vois les Prétendants, ne pensant comme il faut,
Consumer les trésors, vexer l’épouse auguste
D’un preux qui, je l’affirme, accourt vers son pays,
En est déjà bien près. Puisse un dieu tutélaire
Chez toi te renvoyer, à ses yeux te soustraire,
Lorsqu’il retrouvera ses foyers envahis !
Certes à son retour ce n’est pas sans carnage
Que se sépareront l’époux, les amoureux. »

Il dit ; et saintement but le vin généreux,
Puis rendit le calice au princier personnage.
Celui-ci s’éloigna, dans son moral atteint,
Et le front bas ; son cœur sentait proche l’attaque.
Mais il ne put la fuir ; Athéné le retint
Pour le soumettre au bras, au fer de Télémaque.
Il reprit le fauteuil qu’il venait de quitter.

La déesse aux yeux pers, après cette bagarre,
Voulut que Pénélope, enfant du noble Icare,
Se montrât aux Galants, afin de dilater
Leur cœur prétentieux et gagner davantage
Le respect de son fils, l’amour de son époux.
Affectant un souris, la reine eut ce langage :
« Eurynome, à cette heure enfin je me résous
À voir les Prétendants, quoique je les déteste.
Mon fils a grand besoin d’un utile sermon ;
Qu’il ne se mêle plus à cet essaim funeste,