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Après ces mots, jetant de nouveau sur ses reins
Son bissac laid, rompu, qu’attachait une corde,
Il retourna s’asseoir près du seuil ; les Rivaux,
Rentrés dans le salon, l’accueillant de bravos :
« Étranger, que Jupin, que l’Olympe t’accorde
Bonheur et plein succès dans tes vœux actuels,
Pour avoir dérouté ce mendiant, le pire
De l’endroit ; nous allons l’envoyer en Épire,
Au despote Échétus, ce fléau des mortels. »

Ils dirent ; et le preux s’éjouit du symptôme.
Antine lui servit un ventre tout entier,
Plein de graisse et de sang : à son tour, Amphinome
Lui présenta deux pains enlevés d’un panier,
Et, le gratifiant de son orin calice :
« Salut, père étranger, désormais sois heureux !
Car maintenant sur toi pèsent des maux nombreux. »

En ces mots répondit l’ingénieux Ulysse :
« Je te crois, Amphinome, un esprit exercé,
Comme l’avait ton père ; on me fit son éloge.
Nisus de Dulichie était riche, sensé ;
Il t’engendra, dit-on : un tel sang ne déroge.
Donc reçois et conserve un avis important.
De tous les animaux que la Terre alimente
L’homme est en vérité le plus inconsistant.
Jamais pour l’avenir il ne craint de tourmente,
Tant qu’il a du bonheur, que ses genoux sont verts.
Mais quand Zeus assombrit ses heures fortunées,
Ce n’est qu’en rechignant qu’il subit ce revers.
Car l’humeur d’un mortel change avec les journées
Qu’amène le Recteur des hommes et des Dieux.