Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/324

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Dois-je avertir aussi ton malheureux grand-père ?
Bien que pour son Ulysse il fut très affecté,
Il surveillait ses gens, auprès d’eux dans sa terre
Buvait et mangeottait, sans faire de façons.
Or, depuis ton départ vers les sables de Pyle,
L’on m’a dit qu’il repousse aliments et boissons
Et ne va plus aux champs ; tristement immobile,
Il pleure, geint ; sa chair se colle sur ses os. »

Le sage Télémaque aussitôt de répondre :
« Tant pis ! mais, malgré tout, laissons-le se morfondre.
Si nous pouvions filer nous-mêmes nos fuseaux,
Je m’offrirais d’abord le retour de mon père.
Mais vole en ville et rentre, et ne t’écarte pas
Pour visiter l’aïeul ; dis pourtant à ma mère
D’envoyer l’Intendante, en cachette et bon pas,
Annoncer la nouvelle au vieillard qui s’énerve. »

Il dit, presse le pâtre ; en ses mains, lui, d’un bond,
Prend ses souliers, les chausse, et part. Mais de Minerve
Eumée, en s’en allant, n’évite l’œil profond.
La dive alors s’avance, ayant l’air d’une femme
Grande, belle, savante aux ouvrages lustreux.
Au seuil elle fait halte et se révèle au preux.
Télémaque ne voit ce visage de flamme,
Car à tous les mortels les Dieux ne s’ouvrent point.
Mais Ulysse et les chiens l’aperçoivent ; les bêtes
Se sauvent en grondant aux porcines retraites.
Pallas meut les sourcils ; Ulysse, tout à point,
Sort du buron, franchit l’épineuse façade
Et se tient devant elle. Aussitôt Athéné :
« Célestiel Ulysse, adroit Laërtiade,