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Mais quand l’altier Jupin décréta cette noise
Qui de tant de héros les jarrets détendit,
Je dus mener à Troie, avec Idoménée,
Les nefs de mon pays : des refus décevants
Auraient dans le public terni ma renommée.
Là-bas, nous fils des Grecs, nous luttâmes neuf ans ;
Le dixième, au crouler du rempart Priamide,
On s’embarqua ; mais vite un dieu nous désunit.
La Providence enfin pour moi devint rigide,
Car un mois seulement j’occupai mon doux nid,
Prés de ma chaste épouse et de mes fils ; ensuite
Je voulus vers l’Égypte aller, dans mes humeurs,
Avec de beaux voiliers, une marine instruite.
J’artillai neuf transports, bientôt pleins de rameurs.

« Mes gentils compagnons furent six jours en fête.
Moi, je leur fournissais des victimes en tas
Pour le saint sacrifice et leurs propres repas.
Au septième matin, loin de la vaste Crète
Nous filâmes, poussés comme dans un courant
Par le souffle moelleux du propice Borée.
Nulle avarie aux nefs, point d’estomac souffrant ;
Brise et nautes guidaient notre marche assurée.
Cinq jours après, brilla le Fleuve égyptien ;
Dans son lit radieux j’établis mes ancrages.
Puis, ayant invité chacun des équipages
À rester à son bord en sévère gardien,
Au loin je déployai quelques gens de nos prames.
Ceux-là, cœurs forcenés, cédant à leurs penchants,
Ravagèrent soudain les magnifiques champs,
Et, leurs colons tués, emmenèrent les femmes,
Plus les enfants. Un cri parvint à la cité.