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Heureux de rencontrer un appui dans l’arène ;
Aussi déclama-t-il d’une plus fière voix :
« Jeunes gens, doublez donc ma pierre ; tout à l’heure,
Je vais en lancer une aussi bonne ou meilleure.
Que celui d’entre vous qui cherche des exploits,
Puisqu’on m’a courroucé, vienne, avec moi s’escrime
Du poing, à bras-le-corps, ou des pieds ; je me bats
Avec tout Schérien, hormis Laodamas.
Il m’héberge : peut-on braver qui nous ranime ?
Seul, un homme imbécile, un être du commun
Se pose dans la lice en rival de son hôte,
Chez un peuple étranger : il se perd par sa faute.
Quant aux autres lutteurs, je n’en excepte aucun ;
Je veux tous les connaître et les battre à la file.
Nul assaut n’est par moi mis dans un lâche oubli.
Ma main habilement sait tendre un arc poli ;
Le premier j’atteindrais, dans une masse hostile,
Tel champion notable, eussé-je à mes côtés
Vingt compagnons experts tirant sur cette proie.
Philoctète avait seul des traits plus redoutés,
Quand, nous Grecs, nous dardions nos flèches devant Troie.
Je prétends aux combats marcher le plus dispos
Des tritureurs de blé que Cérès multiplie ;
Mais je ne lutterais contre les vieux héros,
Contre Hercule, ni contre Euryte d’Œchalie,
Qui provoquaient, à l’arc, même les Immortels.
Aussi le grand Euryte est-il mort avant l’âge,
Dans son palais ; Phœbus l’anéantit de rage,
Pour en avoir reçu des défis solennels.
Ma pique va plus loin que d’un autre la flèche.
À la course pourtant je crains d’être vaincu
Par un Phéacien, car l’abîme revêche