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Pour que des habitants il devînt le délice,
S’annonçât redoutable, enfin sortît vainqueur
Des luttes qui bientôt éprouveraient Ulysse.

Lorsque les arrivants eurent pris place en chœur,
Alcine, comme il suit, harangua l’assemblée :
« Oyez, princes et chefs des Phéaces cantons ;
Notre bouche dira ce que nous méditons.
Errant, cet inconnu sous mon toit vint d’emblée,
Des pays de l’aurore ou de ceux du couchant.
Or de le reconduire il nous prie, il nous presse.
Eh bien, selon l’usage, obligeons sa détresse ;
Car jamais pérégrin de mon seuil approchant
N’eut longtemps à gémir après sa départie.
Lançons un bateau vierge au creux des flots divins,
Et dans la fine fleur d’une équipe hardie
Qu’on choisisse du coup cinquante-deux marins.
Liez vite à leurs bancs les rames impulsives,
Et revenez tantôt préparer un repas
Dans mon brillant logis ; vous serez mes convives.
Ce sont nos jeunes gens que je pousse là-bas ;
Mais vous, rois porte-sceptre, avec moi que l’on rentre
Au palais, pour fêter l’étranger dignement.
Que nul ne me refuse, et mandez le doux chantre
Démodocus : un dieu lui donna hautement
L’art de nous enchanter, quand à sa verve il cède. »

Il dit ; ouvre la marche, et les rois ensceptrés
Le suivent : un héraut court au céleste aède.
Cinquante-deux garçons, matelots préférés,
Partent obéissants vers la plage écumeuse.
Arrivés au vaisseau sur le sable dormant,