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Alors s’évapora l’enveloppe divine.
À cet étrange aspect, les princes furent tous
Étonnés et sans voix ; mais aussitôt Ulysse :
« Arété, qu’engendra l’immortel Rhexénor,
Dans mes maux je t’invoque, et je supplie encor
Ton époux et ces chefs. Que le ciel embellisse
Leur vie, et que chacun puisse transmettre aux siens
Sa maison, son avoir, ses dignités entières !
Quant à moi, dépêchez mon retour dans mes terres,
Car depuis bien longtemps je souffre loin des miens. »

Il dit ; et va s’asseoir près du feu, dans la cendre
Du foyer ; les oyants restent silencieux.
Le héros Échénée enfin se fait entendre ;
Des Phéaques sujets il était le plus vieux.
Orateur excellent, savant incomparable,
Son âge lui dicta ce tendre plaidoyer :
« Alcinoüs, il n’est ni beau ni convenable
Qu’un hôte s’accroupisse aux cendres du foyer.
Nous guettons anxieux ce que tu vas résoudre.
Pourvois donc l’étranger d’un siège aux clous d’argent ;
Que, par tes serviteurs le vin se mélangeant,
Également l’on boive à Jupin darde-foudre,
Qui protège les pas des visiteurs sacrés.
Et que pour celui-ci ta prome aille à l’office. »
Le sire Alcinoüs, à ces mots inspirés,
Prend vite par la main l’illustre et sage Ulysse,
Le relève, et l’assied sur un trône éclatant,
À la place d’honneur du preux Laodamante,
Le plus cher de ses fils, son fidèle assistant.
Dans un bassin d’argyre ensuite une servante
Répand, d’un cruchon d’or, l’eau des ablutions,