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Mais toi, reine, sers-moi, car c’est toi que d’abord
J’implorai dans mes maux ; je ne connais personne
Parmi les occupants de ces étranges lieux.
Indique-moi la ville, et d’un lambeau de toile,
Si tu t’en es munie, à mon corps fais un voile.
Et que l’Olympe exauce entièrement tes vœux ;
Qu’il te donne un époux, un foyer que cimente
La concorde : en effet, il n’est rien de meilleur,
Rien n’est plus doux à voir que l’union charmante
Des couples assortis : elle abat le railleur,
Enchante l’ami sûr et les grandit eux-mêmes. »

La princesse aux bras blancs de suite répondit :
« Étranger, tu n’as l’air d’un fou ni d’un bandit ;
Mais Zeus Olympien de ses faveurs extrêmes
Aux bons comme aux méchants fait l’aumône à son gré.
Porte patiemment le fardeau qu’il t’impose.
Cependant, puisque ici tes pieds ont pénétré,
Tu vas être pourvu d’habits, de toute chose,
Comme il sied au souffrant qui prie avec douceur.
Je t’apprendrai la ville et quel peuple y fourmille :
C’est le Phéacien, de l’île possesseur.
Du grand Alcinoüs, pour moi, je suis la fille ;
Des Phéaces mon père est l’arbitre et le roi.»

À ces mots, rappelant sa troupe aux longues tresses :
« Chères, venez. Quoi donc ! un homme est votre effroi ?
Craignez-vous d’un voisin les attaques traîtresses ?
Il n’est pas né, jamais il ne verra le jour
Celui qui portera la guerre tapageuse
Dans nos cantons ; les dieux aiment trop ce séjour.
Nous vivons aux confins de la mer naufrageuse,