Page:Homère - Odyssée, traduction Leconte de Lisle, 1893.djvu/449

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Elles parlèrent ainsi, et la vénérable Déesse leur répondit :

— Chères enfants, qui que vous soyez parmi les faibles femmes, salut ! Je vous parlerai, car il est juste de vous dire la vérité à vous qui m’interrogez. Dèô est mon nom, et ma mère vénérable me l’a donné. Je viens maintenant de la Krètè, sur le large dos de la mer, non volontairement, car des pirates m’en ont enlevée par la violence. Puis, ils menèrent leur nef rapide à Thorikos, où toutes les femmes descendirent en foule à terre, et ils préparèrent eux-mêmes leur repas auprès des câbles de la nef. Mais je n’avais point le désir du doux repas, et, m’élançant à la dérobée à travers la noire terre ferme, j’ai fui ces maîtres insolents, de peur que, ne m’ayant pas achetée, ils me vendissent et eussent un prix de moi. Et je suis venue ici en errant, et je ne sais quelle est cette terre et quels sont ceux qui l’habitent. Pour vous, que les Dieux qui ont des demeures Olympiennes vous accordent de jeunes maris et des enfants tels qu’en souhaitent des parents ! Mais, ayez pitié de moi, jeunes Vierges ! chères filles, soyez-moi bienveillantes, jusqu’à ce que j’arrive à la demeure d’un homme ou d’une femme pour qui je travaillerai volontiers, selon ce que peut faire une vieille femme. Je porterais dans mes bras et je nourrirais bien un enfant nouveau-né, ou je garderais la demeure, ou je dresserais le lit des maîtres au fond de la chambre nuptiale, ou j’enseignerais leurs travaux aux femmes.

La Déesse parla ainsi, et, aussitôt, la vierge Kallidikè, la plus belle des filles de Kéléos, lui répondit :

— Mère, nous subissons, quelque pénibles qu’ils soient, les présents des Dieux, car ceux-ci sont de beaucoup les plus puissants. Mais je t’instruirai entièrement et je te nommerai les hommes qui ont ici le plus de pouvoir, et qui dominent parmi le peuple, et qui gardent les murailles de la ville par leur sagesse et leurs jugements équitables :