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qui s’irritent sans doute de m’attendre. Souviens-toi, et ne néglige point mes paroles.

Et le sage Tèlémakhos lui répondit :

— Étranger, tu m’as parlé en ami, comme un père à son fils, et je n’oublierai jamais tes paroles. Mais reste, bien que tu sois pressé, afin que t’étant baigné et ayant charmé ton cœur, tu retournes vers ta nef, plein de joie, avec un présent riche et précieux qui te viendra de moi et sera tel que des amis en offrent à leurs hôtes.

Et la Déesse Athènè aux yeux clairs lui répondit :

— Ne me retiens plus, il faut que je parte. Quand je reviendrai, tu me donneras ce présent que ton cœur me destine, afin que je l’emporte dans ma demeure. Qu’il soit fort beau, et que je puisse t’en offrir un semblable.

Et Athènè aux yeux clairs, ayant ainsi parlé, s’envola et disparut comme un oiseau ; mais elle lui laissa au cœur la force et l’audace et le souvenir plus vif de son père. Et lui, le cœur plein de crainte, pensa dans son esprit que c’était un Dieu. Puis, le divin jeune homme s’approcha des Prétendants.

Et l’Aoide très-illustre chantait, et ils étaient assis, l’écoutant en silence. Et il chantait le retour fatal des Akhaiens, que Pallas Athènè leur avait infligé au sortir de Troiè. Et, de la haute chambre, la fille d’Ikarios, la sage Pènélopéia, entendit ce chant divin, et elle descendit l’escalier élevé, non pas seule, mais suivie de deux servantes. Et quand la divine femme fut auprès des Prétendants, elle resta debout contre la porte, sur le seuil de la salle solidement construite, avec un beau voile sur les joues, et les honnêtes servantes se tenaient à ses côtés. Et elle pleura et dit à l’Aoide divin :

— Phèmios, tu sais d’autres chants par lesquels les Aoides célèbrent les actions des hommes et des Dieux. Assis au milieu de ceux-ci, chante-leur une de ces choses, tandis qu’ils boivent du vin en silence ; mais cesse ce triste