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    Tu doibs ſcavoir (mon Filz) que les Prieres
Oraiſons ſont Filles droicturieres
De Iuppiter, ſuivans par tout l’Injure,
Laquelle eſt bien plus Robuſte & plus Dure
Qu’elles ne ſont. Car la Priere eſt Louſche,
Boiteuſe, & Foible : & l’Injure eſt Farouſche,
Et bien allant tellement qu’elle avance
Plus de Chemin, & touſjours les devance.
Lors pas à pas les Foiblettes la ſuyvent.
Et ſ’il advient qu’en meſme lieu arrivent,
Et quelles ſoient de bon cueur acceptées
Du perſonage auquel ſont preſentéeſ :
Incontinent à Iuppiter ſupplient
En ſa faveur, & à ſon Gré le plient.
Ei au rebours ſi l’on faict plus de compte
De ceſte injure, elles pleines de Honte
De leur Rebut, vont le tout rapporter
Aux Dieux haultainſ : les prians qu’arreſter
Facent l’Injure, en la propre Maiſon
De c’il qui n’a ouy leur Oraiſon.
Certes mon Filz, tu doibs pour le devoir
De ton Honeur, ces Dames recevoir.
Meſmes voyant les Preſens de valeur,
Qui à l’accord donnent plus de Couleur.
Quand noſtre Chef ſerait Opiniaſtre,
Tenant ſon Cueur, & tant Acariaſtre,
Qu’il ne vouldroit à toy ſ’humilier,
Ne par beaulx Dons te reconcilier :
Ie n’oſerois te conſeiller de faire
Rien pour les Grecs, tant fuſt urgent l’Affaire.
Mais quand ie voy l’Offre ſi belle & grande,
Et le deſir dont ton Amour demande,