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Dedans la main delicate, & divine,
De la Deeſſe Amoureuſe & Benigne.
Dont affligée & dolente en ſon cueur,
Sentit couler la celeſte liqueur,
Et le clair Sang, qui povoit eſtre tel,
Comme eſt le ſang yſſu d’ung immortel.
Car pour autant que les Dieux point ne mengent
Des fruictz de terre, & que du vin ſ’eſtrangent,
N’ont point d’humeur pareil au ſang de l’homme :
Et pour cela Immortelz on les nomme.
    Trop fut Venus dolente & courroucée :
En ſe voyant par ung mortel bleſſée.
Si ſ’eſcria en plourant, & par craincte
D’habandonner Eneas fut contrainte.
Lequel Phœbus en ſes bras voulut prendre
Subitement, & des Grecs le déefendre :
L’envelopant, & couvrant d’une Nue,
Qui ſe monſtra ſoubdain à ſa venue.
Diomedés ce pendant provoquoit
Venus à ire, & d’elle ſe moquoit.
Va t’en va t’en, & plus ne te travaille,
(Ce diſoit il) de venir en bataille.
Suffiſe toy ſeulement de ſcavoir,
Par tes fins tours les Femmes decevoir :
Sans te meſler avecques les Gendarmes :
Car ſi tu veulx ainſi hanter les armes,
Ung jour viendra que tu le ſentiras
Si aſprement, que t’en repentiras.
    Ainſi diſoit le Grec à la Deeſſe :
Qui ſupportoit grand douleur, & triſteſſe,
Tant pour le mal de la playe receue,
Que du Courroux & de l’ire conceue,