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commandait Mèrionès, le compagnon d’Idoméneus qui aime les braves. Et ils déposèrent le bois sur le rivage, là où Akhilleus avait marqué le grand tombeau de Patroklos et le sien.

Puis, ayant amassé un immense monceau, ils s’assirent, attendant. Et Akhilleus ordonna aux braves Myrmidones de se couvrir de leurs armes et de monter sur leurs chars. Et ils se hâtaient de s’armer et de monter sur leurs chars, guerriers et conducteurs. Et, derrière les cavaliers, s’avançaient des nuées d’hommes de pied ; et, au milieu d’eux, Patroklos était porté par ses compagnons, qui couvraient son cadavre de leurs cheveux qu’ils arrachaient. Et, triste, le divin Akhilleus soutenait la tête de son irréprochable compagnon qu’il allait envoyer dans le Hadès.

Et quand ils furent arrivés au lieu marqué par Akhilleus, ils déposèrent le corps et bâtirent le bûcher. Et le divin Akhilleus aux pieds rapides eut une autre pensée. Et il coupa, à l’écart, sa chevelure blonde qu’il avait laissée croître pour le fleuve Sperkhios ; et, gémissant, il dit, les yeux sur la mer sombre :

— Sperkhios ! c’est en vain que mon père Pèleus te promit qu’à mon retour dans la chère terre de la patrie je couperais ma chevelure, et que je te sacrifierais de saintes hécatombes et cinquante béliers, à ta source, là où sont ton temple et ton autel parfumé. Le vieillard te fit ce vœu ; mais tu n’as point exaucé son désir, car je ne reverrai plus la chère terre de la patrie. C’est au héros Patroklos que j’offre ma chevelure pour qu’il l’emporte.

Ayant ainsi parlé, il déposa sa chevelure entre les mains de son cher compagnon, augmentant ainsi la douleur de tous, et la lumière de Hélios fût tombée tandis qu’ils pleuraient encore, si Akhilleus, s’approchant d’Agamemnôn, ne lui eût dit :

— Atréide, à qui tout le peuple Akhaien obéit, plus tard