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corps chez Aidès, pleurant sa destinée mauvaise, sa vigueur et sa jeunesse.

Et Akhilleus dit à son cadavre :

— Meurs ! Je subirai ma destinée quand Zeus et les autres dieux le voudront.

Ayant ainsi parlé, il arracha sa lance d’airain du cadavre, et, la posant à l’écart, il dépouilla les épaules du Priamide de ses armes sanglantes. Et les fils des Akhaiens accoururent, et ils admiraient la grandeur et la beauté de Hektôr ; et chacun le blessait de nouveau, et ils disaient en se regardant :

— Certes, Hektôr est maintenant plus aisé à manier que le jour où il incendiait les nefs.

Ils parlaient ainsi, et chacun le frappait. Mais aussitôt que le divin Akhilleus aux pieds rapides eut dépouillé le Priamide de ses armes, debout au milieu des Akhaiens, il leur dit ces paroles ailées :

— Ô amis, princes et chefs des Argiens, puisque les dieux m’ont donné de tuer ce guerrier qui nous a accablés de plus de maux que tous les autres à la fois, allons assiéger la ville, et sachons quelle est la pensée des Troiens : s’ils veulent, le Priamide étant mort, abandonner la citadelle, ou y rester, bien qu’ils aient perdu Hektôr. Mais à quoi songe mon esprit ? Il gît auprès des nefs, mort, non pleuré, non enseveli, Patroklos, que je n’oublierai jamais tant que je vivrai, et que mes genoux remueront ! Même quand les morts oublieraient chez Aidès, moi je me souviendrai de mon cher compagnon. Et maintenant, ô fils des Akhaiens, chantez les paians et retournons aux nefs en entraînant ce cadavre. Nous avons remporté une grande gloire, nous avons tué le divin Hektôr, à qui les Troiens adressaient des vœux, dans leur ville, comme à un dieu.

Il parla ainsi, et il outragea indignement le divin Hektôr. Il lui perça les tendons des deux pieds, entre le talon et la