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combats au premier rang, parmi les guerriers illustres, à l’heure où la mêlée retentit. Quelques-uns des Akhaiens cuirassés peuvent ne m’avoir point vu, mais toi, tu me connais.

Et Idoméneus, prince des Krètois, lui répondit :

— Je sais quel est ton courage. Pourquoi me parler ainsi ? Si nous étions choisis parmi les plus braves pour une embuscade, car c’est là que le courage des guerriers éclate, là on distingue le brave du lâche, car celui-ci change à tout instant de couleur, et son cœur n’est point assez ferme pour attendre tranquillement en place ; et il remue sans cesse, tantôt sur un pied, tantôt sur l’autre ; et son cœur tremble dans sa poitrine par crainte de la mort, et ses dents claquent, tandis que le brave ne change point de couleur, et il ne redoute rien au premier rang des guerriers, dans l’embuscade, et il souhaite l’ardent combat ; certes, donc, aucun de nous ne blâmerait en cet instant ni ton courage ni ton bras ; et si tu étais blessé alors, ce ne serait point à l’épaule ou dans le dos que tu serais frappé d’un trait, mais en pleine poitrine ou dans le ventre, tandis que tu te précipiterais dans la mêlée des combattants. Va ! ne parlons plus, inactifs, comme des enfants, de peur que ceci nous soit reproché injurieusement. Va dans ma tente, et prends une lance solide.

Il parla ainsi, et Mèrionès, semblable au rapide Arès, saisit promptement dans la tente une lance d’airain, et il marcha avec Idoméneus, plein du désir de combattre. Ainsi marche le désastreux Arès avec la Terreur, sa fille bien-aimée, forte et indomptable, qui épouvante le plus brave. Ils descendent de la Thrèkè vers les Épirotes ou les magnanimes Phlègyens, et ils n’exaucent point les deux peuples à la fois, mais ils accordent la gloire à l’un ou à l’autre. Ainsi Mèrionès et Idoméneus, princes des hommes, marchaient, armés de l’airain splendide.