Page:Homère - Iliade, trad. Leconte de Lisle.djvu/22

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Et la vénérable Hèrè aux yeux de bœuf lui répondit :

― Terrible Kronide, quelle parole as-tu dite ? Certes, je ne t’ai jamais interrogé et n’ai point recherché tes pensées, et tu médites ce qu’il te plaît dans ton esprit. Mais je tremble que la fille du Vieillard de la mer, Thétis aux pieds d’argent, ne t’ait séduit ; car, dès le matin, elle s’est assise auprès de toi et elle a saisi tes genoux. Tu lui as promis, je pense, que tu honorerais Akhilleus et que tu ferais tomber un grand nombre d’hommes auprès des nefs des Akhaiens.

Et Zeus qui amasse les nuées lui répondit, et il dit :

― Insensée ! tu me soupçonnes sans cesse et je ne puis me cacher de toi. Mais, dans ton impuissance, tu ne feras que t’éloigner de mon cœur, et ta peine en sera plus terrible. Si tes soupçons sont vrais, sache qu’il me plaît d’agir ainsi. Donc, tais-toi et obéis à mes paroles. Prends garde que tous les Dieux Olympiens ne puissent te défendre, si j’étends sur toi mes mains sacrées.

Il parla ainsi, et la vénérable Hèrè aux yeux de bœuf fut saisie de crainte, et elle demeura muette, domptant son cœur altier. Et, dans la demeure de Zeus, les Dieux Ouraniens gémirent.

Et l’illustre ouvrier Hèphaistos commença de parler, pour consoler sa mère bien-aimée, Hèrè aux bras blancs :

― Certes, nos maux seront funestes et intolérables, si vous vous querellez ainsi pour des mortels, et si vous mettez le tumulte parmi les Dieux. Nos festins brillants perdront leur joie, si le mal l’emporte. Je conseille à ma mère, bien qu’elle soit déjà persuadée de ceci, de calmer Zeus, mon père bien-aimé, afin qu’il ne s’irrite point de nouveau et qu’il ne trouble plus nos festins. Certes, si l’Olympien qui darde les éclairs le veut, il peut nous précipiter de nos thrônes, car il est le plus puissant. Tente