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cues et de la force d’Aias. Et ils l’emmenèrent vers la Ville, après avoir désespéré de son salut.

Et, de leur côté, les Akhaiens bien armés conduisirent au divin Agamemnôn Aias joyeux de sa victoire. Et quand ils furent arrivés aux tentes de l’Atréide, le roi des hommes Agamemnôn sacrifia au puissant Kroniôn un taureau de cinq ans. Après l’avoir écorché, disposé et coupé adroitement en morceaux, ils percèrent ceux-ci de broches, les firent rôtir avec soin et les retirèrent du feu. Puis, ils préparèrent le repas et se mirent à manger, et aucun ne put se plaindre, en son âme, de manquer d’une part égale. Mais le héros Atréide Agamemnôn, qui commande au loin, honora Aias du dos entier. Et, tous ayant bu et mangé selon leur soif et leur faim, le vieillard Nestôr ouvrit le premier le conseil et parla ainsi, plein de prudence :

— Atréides, et vous, chefs des Akhaiens, beaucoup d’Akhaiens chevelus sont morts, dont le rude Arès a répandu le sang noir sur les bords du clair Skamandros, et dont les âmes sont descendues chez Aidès. C’est pourquoi il faut suspendre le combat dès la lueur du matin. Puis, nous étant réunis, nous enlèverons les cadavres à l’aide de nos bœufs et de nos mulets, et nous les brûlerons devant les nefs, afin que chacun en rapporte les cendres à ses fils, quand tous seront de retour dans la terre de la patrie. Et nous leur élèverons, autour d’un seul bûcher, un même tombeau dans la plaine. Et tout auprès, nous construirons aussitôt de hautes tours qui nous protégeront nous et nos nefs. Et nous y mettrons des portes solides pour le passage des cavaliers, et nous creuserons en dehors un fossé profond qui arrêtera les cavaliers et les chevaux, si les braves Troiens poussent le combat jusque là.

Il parla ainsi, et tous les Rois l’approuvèrent.

Et l’agora tumultueuse et troublée des Troiens s’était