Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/400

Cette page n’a pas encore été corrigée

d’une ignorance systématique & raisonnée, qui est de toutes les ignorances la plus difficile à vaincre & à déraciner. La théologie n’est qu’une science de mots qu’à force de les répéter on s’accoutume à prendre pour des choses ; dès qu’on veut les analyser on trouve qu’ils ne présentent aucun sens véritable. Il est peu d’hommes dans le monde qui pensent, qui se rendent compte de leurs idées, qui aient des yeux pénétrans ; la justesse dans l’esprit est un des dons les plus rares que la nature fasse à l’espèce humaine. Une imagination trop vive, une curiosité précipitée, sont des obstacles aussi puissans à la découverte de la vérité que trop de flegme, que la lenteur de la conception, que la paresse de l’esprit, que l’inhabitude de penser. Tous les hommes ont plus ou moins d’imagination, de curiosité, de flegme, de bile, de paresse, d’activité ; c’est du juste équilibre que la nature a mis dans leur organisation que dépend la justesse de leur esprit. Cependant, comme on l’a dit ci-devant, l’organisation de l’homme est sujette à changer, & les jugemens de son esprit varient avec les changemens que sa machine est forcée de subir : de là les révolutions presque continuelles qui se font dans les idées des mortels, sur-tout quand il s’agit des objets sur lesquels l’expérience ne leur fournit aucuns points fixes pour s’appuyer.

Pour chercher & rencontrer la vérité, que tout s’efforce de nous cacher, que, complices de ceux qui nous égarent, nous voulons souvent nous dissimuler à nous-mêmes, ou que nos terreurs habituelles nous font craindre de trouver, il faut un esprit juste, un cœur droit & de bonne foi avec lui-même, une imagination tempérée par la raison. Avec ces dispositions nous découvri-