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Pour mieux imprimer leurs leçons dans les esprits, ces hommes, devenus les docteurs, les guides & les maîtres des sociétés naissantes, parlèrent à l’imagination de leurs auditeurs. La poësie par ses images, par ses fictions, par ses nombres, son harmonie & son rythme frappa l’esprit des peuples & grava dans leur mémoire les idées qu’on voulut leur donner ; à sa voix la nature entière fut animée, elle fut personnifiée ainsi que toutes ses parties ; la terre, les airs, les eaux, le feu prirent de l’intelligence, de la pensée, de la vie ; les élémens furent divinisés. Le ciel, cet immense espace qui nous entoure, devint le premier des dieux ; le tems son fils, qui détruit ses propres ouvrages, fut une divinité inexorable, qu’on craignit & que l’on révéra sous le nom de saturne ; la matière éthérée, ce feu invisible qui vivifie la nature, qui pénètre & féconde tous les êtres, qui est le principe du mouvement & de la chaleur, fut appellé Jupiter ; il épousa Junon la déesse des airs ; ses combinaisons avec tous les êtres de la nature furent exprimées par ses métamorphoses & ses fréquens adultères ; on l’arma de la foudre, par où l’on voulut indiquer qu’il produisoit les météores. Suivant les mêmes fictions le soleil, cet astre bienfaisant qui influe d’une façon si marquée sur la terre, devint un Osiris, un Belus, un Mithras, un Adonis, un Appollon ; la nature attristée de son éloignement périodique fut une Isis, une Astarté, une Vénus, une Cybèle. Enfin toutes les parties de la nature furent personnifiées ; la mer fut sous l’empire de Neptune ; le feu fut adoré sous les égyptiens sous le nom de Serapis ; sous celui d’Ormus ou d’Oromaze par les perses ; sous les noms de Vesta & de Vulcain chez les romains.