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grand nombre des hommes. Il est dans toutes les nations nombreuses & civilisées des personnes que leurs circonstances mettent à portée de méditer, de faire des recherches & des découvertes utiles, qui finissent tôt ou tard par s’étendre & fructifier, quand elles ont été jugées avantageuses & vraies. Le géometre, le méchanicien, le chimiste, le médecin, le jurisconsulte, l’artisan même travaillent dans leurs cabinets ou dans leurs atteliers à chercher des moyens de servir la société chacun dans sa sphêre ; cependant aucune des sciences ou professions dont ils s’occupent ne sont connues du vulgaire, qui ne laisse pas d’en profiter & de recueillir à la longue les fruits de travaux dont il n’a pas d’idées. C’est pour le matelot que l’astronome travaille ; c’est pour lui que le géometre & le méchanicien calculent ; c’est pour le maçon & le manœuvre que l’architecte habile trace de savans desseins. Quelle que soit l’utilité prétendue des opinions religieuses, le théologien profond & subtil ne peut se vanter de travailler, d’écrire, de disputer pour l’avantage du peuple à qui l’on fait pourtant payer si chérement des systêmes & des mystères qu’il n’entendra jamais, & qui ne pourront dans aucun tems être d’aucune utilité pour lui.

Ce n’est donc pas pour le commun des hommes que le philosophe doit se proposer d’écrire ou de méditer. Les principes de l’athéisme ou le systême de la nature ne sont pas même faits, comme on l’a fait sentir, pour un grand nombre de personnes très éclairées sur d’autres points, mais souvent trop prévenues en faveur des préjugés universels. Il est très rare de trouver des hommes, qui à beaucoup d’esprit, de connoissances & de