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comme des enfans que l’on appaise par des fables & des chimeres. à l’aide de ces merveilleuses inventions dont les chefs & les guides des nations sont souvent eux-mêmes les dupes & qui se transmettent d’une race à l’autre, les souverains sont dispensés de s’instruire, ils négligent les loix, ils s’énervent dans la mollesse, ils ne suivent que leurs caprices, ils se reposent sur les dieux du soin de contenir leurs sujets ; ils confient l’instruction des peuples à des prêtres, chargés de les rendre bien soumis & dévôts & de leur apprendre de bonne heure à trembler sous le joug des dieux invisibles & visibles.

C’est ainsi que les nations sont tenues par leurs tuteurs dans une enfance perpétuelle & ne sont contenues que par de vaines chimeres. C’est ainsi que la politique, la jurisprudence, l’éducation, la morale sont par tout infectées par la superstition. C’est ainsi que les hommes ne connoissent plus de devoirs que ceux de la religion ; c’est ainsi que l’idée de la vertu s’associe faussement avec celle des puissances imaginaires que l’imposture fait parler comme elle veut ; c’est ainsi que la morale devient incertaine & flottante ; c’est ainsi qu’on persuade aux hommes que sans dieu il n’existe plus de morale pour eux. C’est ainsi que les princes & les sujets également aveuglés sur leurs intérêts véritables, sur les devoirs de la nature, sur leurs droits réciproques, se sont habitués à regarder la religion comme nécessaire aux mœurs, comme indispensable pour gouverner les hommes, comme le moyen le plus sûr de parvenir à la puissance & au bonheur.

C’est sur ces suppositions, dont nous avons si