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fet lorsque dans ces sortes de contrées la science, les talens, les germes de la réflexion ne sont point entiérement étouffés, la plûpart des hommes qui pensent, revoltés des abus crians de la religion, de ses folies multipliées, de la corruption & de la tyrannie de ses prêtres, des chaînes qu’elle impose, croient avec raison ne pouvoir jamais trop s’éloigner de ses principes ; le dieu qui sert de base à une telle religion leur devient aussi odieux que la religion elle-même ; si celle-ci les opprime, ils s’en prennent au dieu : ils sentent qu’un dieu terrible, jaloux, vindicatif veut être servi par des ministres cruels ; par conséquent ce dieu devient un objet détestable pour toutes les ames honnêtes & éclairées, dans lesquelles se trouve toujours l’amour de l’équité, de la liberté, de l’humanité, & l’indignation contre la tyrannie. L’oppression donne du ressort à l’ame ; elle force d’examiner de près la cause de ses maux ; le malheur est un aiguillon puissant qui tourne les esprits du côté de la vérité. Combien la raison irritée ne doit-elle pas être redoutable au mensonge ! Elle lui arrache son masque ; elle le poursuit jusques dans ses derniers retranchemens ; elle jouit au moins intérieurement de sa confusion.

    catholiques romains, où les Princes sont communément intolérans & ennemis de la liberté de penser. Au Japon, en Turquie, en Italie, et surtout à Rome, on rencontre beaucoup d’Athées. Plus la superstition a de pouvoir, plus elle révolte les esprits qu’elle n’a pu écraser. C’est d’Italie que sont sortis Jordano Bruno, Campanella, Vanini, &c. Il y a tout lieu de croire que sans les persécutions & les mauvais traitemens des chefs de la Synagogue, Spinosa n’eût, peut-être, jamais imaginé son système. L’on peut encore présumer que les horreurs produites en Angleterre par le fanatisme, qui coûtèrent la vie à Charles I, ont poussé Hobbes à l’Athéisme, l’indignation qu’il conçut pour le pouvoir des prêtres lui suggéra, peut-être, aussi ses principes si favorables au pouvoir absolu des Rois. Il crut qu’il était plus convenable pour un Etat d’avoir un seul despote civil,Souverain de la religion même, que d’avoir une foule de tyrans spirituels, toujours prêts à troubler. Spinosa, séduit par les idées de Hobbes, est tombé dans la même erreur dans son Tractatus Théologico-Politicus, ainsi que dans son traité de Jure ecclesiasticorum.