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déjà à l’être ; au lieu que la superstition lâche la bride aux passions les plus terribles, ou procure des expiations faciles aux vices les plus deshonorans. " l’athéisme, dit le chancellier Bacon, laisse à l’homme la raison, la philosophie, la piété naturelle, les loix, la réputation & tout ce qui peut servir de guide à la vertu ; mais la superstition détruit toutes ces choses, & s’érige en tyrannie dans l’entendement des hommes : c’est pourquoi l’athéisme ne trouble jamais les états, mais il rend l’homme plus prévoyant lui-même, comme ne voyant rien au delà des bornes de cette vie. " le même auteur ajoute " que les tems où les hommes ont panché vers l’athéisme ont été les plus tranquilles ; au lieu que la superstition a toujours enflammé les esprits, & les a portés aux plus grands désordres, parce qu’elle a enivré de nouveautés, le peuple, qui ravit & entraîne toutes les sphères du gouvernement.[1] "

les hommes habitués à méditer & à faire leur plaisir de l’étude ne sont point communément des citoyens dangereux ; quelque soient leurs spéculations elles ne produiront jamais des révolutions subites sur la terre. Les esprits des peuples, susceptibles de s’embraser par le merveilleux & par l’enthousiasme, résistent opiniâtrément aux vérités les plus simples, & ne s’échauffent nullement pour des systêmes qui demandent une longue suite de réflexions & de raisonnemens. Le systême de l’athéisme ne peut-être le fruit que d’une étude suivie, d’une imagination réfroidie par l’expérience

  1. Voyez les Essais de morale de Bacon. Il est bon d’observer que ce passage a été supprimé dans la traduction française de ce traité.