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que l’athée a un prétexte de moins que le prince crédule pour exercer sa méchanceté naturelle.

En effet si l’on daignoit examiner les choses de sang froid, on trouveroit que le nom de Dieu ne servit jamais sur la terre que de prétexte aux passions des hommes. L’ambition, l’imposture & la tyrannie se sont liguées pour s’en servir conjointement afin d’aveugler les peuples & de les tenir sous le joug. Le monarque s’en sert pour donner un éclat divin à sa personne, la sanction du ciel à ses droits, le ton des oracles à ses fantaisies les plus injustes & les plus extravagantes. Le prêtre s’en sert pour faire valoir ses prétentions, afin de contenter impunément son avarice, son orgueil & son indépendance. Le superstitieux vindicatif & colère se sert de la cause de son dieu pour donner un libre cours à ses fureurs qu’il qualifie de zèle. En un mot la religion est dangereuse parce qu’elle justifie & rend légitimes ou louables les passions & les crimes dont elle recueille les fruits ; suivant ses ministres tout est permis pour venger le très haut ; ainsi la divinité ne semble faite que pour autoriser & pallier les forfaits les plus nuisibles. L’athée, quand il commet des crimes, ne peut du moins prétendre que c’est son dieu qui l’ordonne & qui l’approuve ; c’est l’excuse que tous les jours le superstitieux nous donne de sa méchanceté, le tyran de ses persécutions, le prêtre de sa cruauté & de sa sédition, le fanatique de ses excès, le pénitent de son inutilité.

" Ce ne sont point, dit Bayle, les opinions générales de l’esprit qui nous déterminent à agir, mais les passions. " l’athéisme est un sys-