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tueux & tendre se flatte d’être récompensé de la chaleur de son imagination. Le dévot zélé ne doute pas que son Dieu ne le récompense quelque jour de l’ âcreté de sa bile, ou de la chaleur de son sang. Le pénitent, le frénétique, l’atrabilaire, s’imaginent que Dieu leur tiendra compte des folies que leur organisation vicieuse, ou leur fanatisme leur font commettre, & sur-tout sera bien content de la tristesse de leur humeur, de la gravité de leur maintien, de leur inimitié pour les plaisirs. Le dévot, le zêlé, le quérelleur opiniâtre, ne peuvent se persuader que leur dieu, qu’ils font toujours sur leur propre modèle, puisse être favorable à celui qui a plus de flegme, moins de bile, un sang moins bouillant dans sa composition. Chaque mortel croit sa propre organisation la meilleure, la plus conforme à celle de son dieu.

Quelles étranges idées doivent avoir de leur divinité ces aveugles mortels, qui s’imaginent que le maître absolu de tout peut s’offenser des mouvemens qui se passent dans leur corps ou dans leur esprit ! Quelles contradictions, que de penser que son bonheur inaltérable puisse être troublé, ou son plan dérangé par les secousses passagères qu’éprouvent les fibres imperceptibles du cerveau de l’une de ses créatures ! La théologie nous donne des idées bien ignobles d’un dieu, dont pourtant elle ne cesse d’exalter la puissance, la grandeur & la bonté.

Sans un dérangement très marqué dans nos organes, nos sentimens ne varient guères sur les objets que nos sens, que l’expérience, que la raison nous ont bien démontrés. Dans quelque circonstance qu’on nous prenne, nous n’avons aucun dou-