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ves subtiles qu’ils leur donnent de l’existence du dieu qu’ils leur font adorer ?

Peu d’hommes, sans doute, sont capables d’une méditation profonde & suivie ; l’exercice de la pensée est pour la plupart d’entre eux un travail aussi pénible qu’inusité. Le peuple, forcé de travailler pour subsister, est communément incapable de réfléchir. Les grands, les gens du monde, les femmes, les jeunes gens occupés de leurs affaires, du soin de satisfaire leurs passions, de se procurer des plaisirs, pensent aussi rarement que le vulgaire. Il n’est peut-être pas deux hommes sur cent-mille, qui se soient demandé sérieusement ce qu’ils entendent par le mot dieu, tandis qu’il est très-rare de trouver des personnes pour qui l’existence d’un dieu soit un problême : cependant, comme on l’a dit, la conviction suppose l’évidence, qui seule peut procurer de la certitude à l’esprit. Où sont donc les hommes convaincus de l’existence de leur dieu ? Qui sont ceux dans lesquels nous trouverons une certitude compléte de cette prétendue vérité, si importante à tous ? Quels sont les personnages qui se sont rendu compte des idées qu’ils se sont formées sur la divinité, sur ses attributs, sur son essence ? Hélas ! Je ne vois par tout que quelques spéculateurs, qui à force de s’en occuper, ont cru follement démêler quelque chose dans les idées confuses & décousues de leur imagination ; ils ont tâché d’en faire un ensemble que, tout chimérique qu’il est, ils se sont accoutumés à regarder comme existant réellement : à force de rêver ils se sont quelquefois persuadé qu’ils avoient vu clairement, & ils sont parvenus à le faire croire à d’autres qui n’avoient pas autant rêvé qu’eux.