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Ennemie née de l’expérience, la théologie, cette science surnaturelle, fut un obstacle invincible à l’avancement des sciences naturelles, qui la rencontrèrent presque toujours dans le chemin. Il ne fut point permis à la physique, à l’histoire naturelle, à l’anatomie de rien voir qu’à travers les yeux malades de la superstition. Les faits les plus évidens furent rejettés avec dédain, & proscrits avec horreur, dès qu’on ne put les faire cadrer avec les hypothèses de la religion[1]. En un mot, la théologie s’opposa sans cesse au bonheur des nations, aux progrès de l’esprit humain, aux recherches utiles, à la liberté de penser : elle retint l’homme dans l’ignorance ; tous ses pas guidés par elle ne furent que des erreurs. Est-ce résoudre une question dans la physique, que de dire qu’un effet qui nous surprend, qu’un phénomène peu commun, qu’un volcan, un déluge, une comête etc. Sont des signes de la colère divine, ou des œuvres contraires aux loix de la nature ? En persuadant, comme on fait, aux nations, que toutes les calamités soit physiques soit morales qu’elles éprouvent, sont des effets de la volonté de Dieu, ou des châtimens que sa puissance leur inflige, n’est-ce pas les empêcher d’y chercher des remèdes ? [2] N’eut-il pas été plus utile d’étudier la

  1. Virgile, évêque de Salzbourg, fut condamné par glise pour avoir ose’ soutenir l’existence des antipodes. Tout le monde connaît les persécution que souffrit Galilée pour avoir prétendu que le soleil ne tournait point autour de la terre. Descartes fut obligé de mourir hors de son pays. Les prêtres ont raison d’être les ennemis des sciences ; les progrès des lumières anéantiront tôt ou tard les idées de la superstition. Rien de ce qui est fondé sur la nature et sur la vérité ne peut jamais se perdre, les ouvrages de l’imagination et de l’imposture doivent être renversés tôt ou tard.
  2. En l’année 1725 la ville de Paris fut affligée d’une disette, qui pensa exciter un soulèvement du peuple : on descendit îa chasse de Sainte-Geneviève, patrone ou déesse tutélaire des Parisiens, et on la porta en procession pour faire cesser cette calamité, causée par des monopoles dans lesquels élait intéressée la maîtresse du premier ministre d’alors.