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les mieux récompensés. Nous voyons les ennemis nés de la puissance souveraine honorés & chéris par elle ; les sujets les plus rébelles regardés comme les appuis du trône ; les corrupteurs de la jeunesse, rendus les maîtres exclusifs de l’éducation ; les citoyens les moins laborieux richement payés de leur oisiveté, de leurs spéculations futiles, de leurs discordes fatales, de leurs prières inefficaces, de leurs expiations si dangereuses pour les mœurs & si propres à encourager au crime.

Depuis des milliers d’années les nations & les souverains se sont dépouillés à l’envi pour enrichir les ministres des dieux, pour les faire nager dans l’abondance, pour les combler d’honneurs, pour les décorer de titres, de privilèges, d’immunités ; pour en faire de mauvais citoyens. Quels fruits les peuples & les rois ont-ils donc recueilli de leurs bienfaits imprudens, de leur religieuse prodigalité ? Les princes en sont-ils devenus plus puissans, les nations en sont-elles devenues plus heureuses, plus florissantes, plus raisonnables ? Non, sans doute ; le souverain perdit la plus grande portion de son autorité, il fut l’esclave de ses prêtres, ou il fut obligé de lutter sans cesse contre eux ; & la portion la plus considérable des richesses de la société fut employée à maintenir dans l’oisiveté, le luxe & la splendeur ses membres les plus inutiles & les plus dangereux.

Les mœurs des peuples en devinrent-elles meilleures sous ses guides si bien payés ? Hélas ! Les superstitieux n’en connurent jamais ; la religion leur tint lieu de tout ; ses ministres contens de