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Il est donc évident que c’est aux notions théologiques & aux lâches flatteries des ministres de la divinité que sont dûs le despotisme, la tyrannie, la corruption & la licence des princes, & l’aveuglement des peuples à qui l’on défend au nom du ciel d’aimer la liberté, de travailler à leur bonheur, de s’opposer à la violence, d’user de leurs droits naturels. Ces princes énivrés, même en adorant un dieu vengeur & en forçant les autres de l’adorer, ne cessent de l’outrager à chaque instant par leurs déréglemens & leurs crimes. Quelle morale en effet que celle des hommes qui se donnent pour les images vivantes & les représentans de la divinité ! Sont-ce donc des athées que ces monarques, injustes par habitude & sans remords, qui arrachent le pain des mains des peuples affamés, pour fournir au luxe de leurs courtisans insatiables & des vils instrumens de leurs iniquités ? Sont-ce des athées que ces conquérans ambitieux, qui peu contens d’opprimer leurs propres sujets, vont porter la désolation, l’infortune & la mort chez les sujets des autres ? Que voyons-nous dans ces potentats qui de droit divin commandent aux nations, sinon des ambitieux que rien n’arrête, des cœurs parfaitement insensibles aux maux du genre-humain ; des ames sans énergie & sans vertu qui négligent des devoirs évidens dont ils ne daignent pas même s’instruire ; des hommes puissans qui se mettent insolemment au dessus des règles de l’équité naturelle[1] ; des fourbes qui se

  1. L’empereur Charles Quint avait coutume de dire cpL étant un homme de guerre, il lui était impossible d’avoir de la conscience et de la religion : son général, le marquis de Pescaire, disait que rien n’était plus difficile aue de servir à la fois Jésus-christ, et. le dieu Mars. En général, rien n’est plus contraire à l’esprit du christianisme, que la profession des armes, et cependant les princes chrétiens ont des armées nombreuses, et sont perpétuellement en