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d’entendre ce qu’on leur en dit, ils s’imaginent que ceux qui leur en parlent sont plus au fait des choses dont ils les entretiennent ; ceux-ci ne manquent pas de leur répéter que le parti le plus sûr est de s’en rapporter à ce qu’ils disent, de se laisser guider par eux, & de fermer les yeux : ils les menacent de la colère du phantôme irrité, s’ils refusoient de croire ce qu’on en dit ; & cet argument, quoiqu’il suppose la chose en question, ferme la bouche au genre-humain, qui, convaincu par ce raisonnement victorieux, craint d’appercevoir les contradictions palpables de la doctrine qu’on lui annonce, s’en rapporte aveuglément à ses guides, ne doutant pas qu’ils n’ayent des idées bien plus nettes sur les objets merveilleux dont ils l’entretiennent sans cesse, & que leur profession les oblige de méditer. Le vulgaire croit des sens de plus à ses prêtres qu’à lui ; il les prend pour des hommes divins ou pour des demi-dieux. Il ne voit dans ce qu’il adore que ce que les prêtres en disent, & de tout ce qu’ils en disent il résulte pour un homme qui pense que Dieu n’est qu’un être de raison, un phantôme revêtu des qualités que les prêtres ont jugé convenables de lui donner pour redoubler l’ignorance, les incertitudes & les craintes des mortels. C’est ainsi que l’autorité des prêtres décide sans appel de la chose qui n’est utile qu’aux prêtres.

Quand nous voudrons remonter à l’origine des choses, nous trouverons toujours que c’est l’ignorance & la crainte qui ont créé les dieux, que c’est l’imagination, l’enthousiasme & l’imposture qui les ont ornés ou défigurés, que c’est la foiblesse qui les adore, que c’est la crédulité qui les nourrit, que c’est l’habitude qui les respecte, que