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des roues faites d’un métal poli. Il verra encore que ces parties séparées les unes des autres n’agissent plus comme lorsqu’elles étoient assemblées ; d’après ces observations le sauvage attribuera la montre à un homme, c’est-à-dire, à un être comme lui, dont il a des idées, mais qu’il juge capable de faire des choses qu’il ne sçait pas faire lui-même ; en un mot il fera honneur de cet ouvrage à un être connu à quelques égards, pourvu de quelques facultés supérieures aux siennes, mais il se gardera bien de penser qu’un ouvrage matériel puisse être l’effet d’une cause immatérielle, ou d’un agent privé d’organes & d’étendue, dont il est impossible de concevoir l’action sur des êtres matériels : au lieu que, faute de connoître le pouvoir de la nature, nous faisons honneur de ses ouvrages à un être que nous connoissons bien moins qu’elle, & à qui, sans le connoître, nous attribuons ceux d’entre ses travaux que nous comprenons le moins. En voyant le monde nous reconnoissons une cause matérielle des phénomènes qui s’y passent ; & cette cause c’est la nature, dont l’énergie se montre à ceux qui l’étudient.

Que l’on ne nous dise point que d’après cette hypothèse nous attribuons tout à une cause aveugle, au concours fortuit des atômes, au hazard. Nous n’appellons causes aveugles que celles dont nous ne connoissons point le concours, la force & les loix. Nous appellons fortuits des effets dont nous ignorons les causes & que notre ignorance & notre inexpérience nous empêchent de pressentir. Nous attribuons au hazard tous les effets dont nous ne voyons point la liaison nécessaire avec leurs causes. La nature n’est point une cause aveugle ; elle n’agit point au hazard ;