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on voyoit le corps sujet, ainsi que tous les êtres composés dont la nature est remplie.

Ainsi l’homme devint double ; il se regarda comme un tout composé par l’assemblage inconcevable de deux natures différentes, & qui n’avoient point d’analogie entre elles. Il distingua deux substances en lui-même ; l’une visiblement soumise aux influences des êtres grossiers & composés de matieres grossières & inertes, fut nommée corps ; l’autre que l’on supposa simple, d’une essence plus pure, fut regardée comme agissante par elle-même & donnant le mouvement au corps avec lequel elle se trouvoit miraculeusement unie ; celle-ci fut nommée ame, ou esprit ; & les fonctions de l’une furent nommées physiques, corporelles, matérielles ; les fonctions de l’autre furent appellées spirituelles & intellectuelles ; l’homme considéré relativement aux premières fut appelé l’homme physique : & quand on le considéra relativement aux dernières, il fut désigné sous le nom d’homme moral.

Ces distinctions adoptées aujourd’hui par la plûpart des philosophes, ne sont fondées que sur des suppositions gratuites. Les hommes ont toujours cru remédier à l’ignorance des choses en inventant des mots, auxquels il ne purent jamais attacher un vrai sens. On s’imagina que l’on connoissoit la matiere, toutes ses propriétés, toutes ses facultés, ses ressources & ses différentes combinaisons, parcequ’on en avoit entrevu quelques qualités superficielles ; l’on ne fit réellement qu’obscurcir les foibles idées que l’on avoit pu s’en former en lui associant une substance beaucoup moins intelligible qu’elle-même. C’est ainsi que