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leur état & de réſiſter à la diſſolution : les corps que nous nommons ſolides ſont compoſés d’un plus grand nombre de parties homogenes, ſimilaires, analogues dispoſées à s’unir, & dont les forces conſpirent ou tendent à une même fin. Les êtres primitifs ou les élémens des corps ont beſoin de s’étayer, pour ainſi dire, les uns les autres afin de ſe conſerver, d’acquérir de la conſiſtence & de la ſolidité ; vérité également conſtante dans ce qu’on appelle le phyſique & dans ce qu’on appelle le moral.

C’est ſur cette dispoſition des matieres & des corps les uns rélativement aux autres que ſont fondées les façons d’agir que les phyſiciens déſignent ſous les noms d’attraction & de répulſion, de ſympathie & d’antipathie, d’affinités ou de rapports [1]. Les moraliſtes déſignent cette dispoſition & les effets qu’elle produit ſous le nom d’amour & de haine, d’amitié ou d’averſion. Les hommes, comme tous les êtres de la nature, éprouvent des mouvemens d’attraction & de répulſion ; ceux qui ſe paſſent en eux ne different des autres que parce qu’ils ſont plus cachés, & que ſouvent nous ne connoiſſons point les cauſes qui les excitent, ni leur façon d’agir.

Quoiqu’il en ſoit, il nous ſuffit de ſçavoir

  1. Empédocle diſoit, ſelon Diogene Laërce, qu’il y avoit une ſorte d’amitié par laquelle les élémens s’uniſſoient, & une ſorte de diſcorde par laquelle ils s’éloignoient. D’où l’on voit que le Syſtême de l’attraction eſt fort ancien, mais il falloit un Newton pour le développer. L’amour à qui les anciens attribuoient le débrouillement du Cahos, ne paroît être que l’attraction perſonnifiée. Toutes les allégories & les fables des anciens ſur le cahos n’indiquent viſiblement que l’accord & l’union qui ſe trouve entre les ſubſtances analogues ou homogenes, d’où réſulte l’exiſtence de l’univers, tandis que la répulſion ou la diſcorde, que les anciens nommoient ερις étoit la cauſe de la diſſolution, de la confuſion, du déſordre. Voilà ſans doute l’origine du dogme des deux principes.