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d’avouer que la nature a des reſſources que nous ne connoiſſons pas ; mais ne ſubſtituons jamais des phantômes, des fictions ou des mots vuides de ſens aux cauſes qui nous échappent ; nous ne ferions par là que nous confirmer dans l’ignorance, nous arrêter dans nos recherches, & nous obſtiner à croupir dans nos erreurs.

Malgré l’ignorance où nous ſommes des voies de la nature ou de l’eſſence des êtres, de leurs propriétés, de leurs élémens, de leurs proportions & combinaiſons, nous connoiſſons pourtant les loix ſimples & générales ſuivant leſquelles les corps se meuvent, & nous voyons que quelques-unes de ces loix, communes à tous les êtres ne ſe démentent jamais ; lorſqu’elles ſemblent ſe démentir dans quelques occaſions, nous ſommes ſouvent à portée de découvrir les cauſes qui, venant à ſe compliquer en ſe combinant avec d’autres, empêchent qu’elles n’agiſſent de la façon que nous nous croyions en droit d’en attendre. Nous ſçavons que le feu appliqué à la poudre doit néceſſairement l’allumer : dès que cet effet ne s’opere point, quand même nos ſens ne nous l’apprendroient pas, nous ſommes en droit de conclure que cette poudre eſt mouillée ou ſe trouve jointe à quelque ſubſtance qui empêche ſon exploſion. Nous ſcavons que l’homme dans toutes ſes actions tend à ſe rendre heureux ; quand nous le voyons travailler à ſe détruire ou à ſe nuire à lui-même, nous devons en conclure qu’il eſt mû par quelque cauſe qui s’oppoſe à ſa tendance naturelle, qu’il eſt trompé par quelque préjugé, que faute d’expériences il ne voit point où ſes actions peuvent le mener.

Si tous les mouvemens des êtres étoient ſim-