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ſupposer des qualités quelconques, deſquelles les mouvemens ou les façons d’agir, déterminées par ces mêmes qualités, doivent néceſſairement découler. Pour former l’univers, Deſcartes ne demandoit que de la matiere & du mouvement. Une matiere variée lui ſuffiſoit, les mouvemens divers étoient des ſuites de ſon exiſtence, de ſon eſſence & de ſes propriétés ; ſes différentes façons d’agir ſont des ſuites néceſſaires de ſes différentes façons d’être. Une matiere ſans propriétés eſt un pur néant. Ainſi dès que la matiere exiſte, elle doit agir ; dès qu’elle eſt diverſe, elle doit agir diverſement ; dès qu’elle n’a pu commencer d’exiſter, elle exiſte depuis l’éternité, elle ne ceſſera jamais d’être & d’agir par ſa propre énergie, & le mouvement eſt un mode qu’elle tient de ſa propre exiſtence.

L’existence de la matiere eſt un fait ; l’exiſtence du mouvement eſt un autre fait. Nos yeux nous montrent des matieres d’eſſences différentes, douées de propriétés qui les diſtinguent entre elles, formant des combinaisons diverſes. En effet c’eſt une erreur de croire que la matiere ſoit un corps homogène & dont les parties ne different entre elles que par leurs différentes modifications. Parmi les individus que nous connoiſſons, dans une même eſpèce, il n’en eſt point qui ſe reſſemblent exactement ; & celà doit être ainſi, la ſeule différence du ſite doit néceſſairement entraîner une diverſité plus ou moins ſenſible non ſeulement dans les modifications mais encore dans l’eſſence, dans les propriétés, dans le ſyſtême entier des êtres. [1]

  1. Ceux qui ont obſervé la nature de près ſçavent que deux grains de ſable ne ſont point ſtrictement égaux. Dès que les circonſtances ou les modifications ne ſont point les mêmes pour les