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se renouvelloient sans cesse ainsi que les besoins de l’autre ; ils n’ont point voulu croire que ces besoins de l’ame ainsi que ceux du corps sont purement physiques, & que l’une & l’autre n’étoient jamais remués que par des objets physiques & matériels. Ils n’ont point eu d’égard à la liaison intime & continuelle de l’ame avec le corps ; ou plutôt ils n’ont point voulu convenir qu’ils ne sont qu’une même chose, envisagée sous différens points de vue. Obstinés dans leurs opinions surnaturelles, ou inintelligibles, ils ont refusé d’ouvrir les yeux pour voir que le corps en souffrant rendoit l’ame malheureuse, & que l’ame affligée minoit & faisoit dépérir le corps. Ils n’ont point considéré que les plaisirs & les peines de l’esprit influoient sur ce corps, & le plongeoient dans l’affaissement ou lui donnoient de l’activité. Ils ont cru que l’ame tiroit ses pensées soit riantes soit lugubres de son propre fond ; tandis que ses idées ne lui viennent que des objets matériels qui agissent, ou qui ont agi matériellement sur ses organes ; tandis qu’elle n’est déterminée soit à la gaieté soit à la tristesse que par l’état durable ou passager dans lequel se trouvent les solides & les fluides de notre corps. En un mot ils n’ont point reconnu que cette ame, purement passive, subissoit les mêmes changemens qu’éprouvoit le corps, n’étoit remuée que par son intermède, n’agissoit que par son secours, & recevoit souvent à son insçu & malgré elle de la part des objets physiques qui la remuent, ses idées, ses perceptions, ses sensations, son bonheur ou son malheur.

Par une suite de ces opinions, liées à des systêmes merveilleux, ou inventées pour les justifier, on supposa que l’ame humaine étoit libre,