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dans une société bien constituée le gouvernement, l’éducation, les loix, l’exemple, l’instruction devroient conspirer à prouver à chaque citoyen que la nation dont il fait partie, est un ensemble qui ne peut être heureux & subsister sans vertus ; l’expérience devroit à chaque instant le convaincre que le bien-être des parties ne peut résulter que de celui du corps ; la justice lui feroit sentir que la société, pour être avantageuse, devroit être un systême de volontés, dans lequel celles qui agissent d’une façon conforme aux intérêts du tout, éprouveroient infailliblement une réaction avantageuse.

Mais hélas ! Par le renversement que les erreurs des hommes ont mis dans leurs idées, la vertu disgraciée, bannie, persécutée ne trouve aucun des avantages qu’elle est en droit d’espérer. L’on est forcé de lui montrer dans l’avenir des récompenses dont elle est presque toujours privée dans le monde actuel ; on se croit obligé de tromper, de séduire, d’intimider les mortels pour les engager à suivre une vertu que tout leur rend incommode ; on les repaît d’espérances éloignées ; on les allarme par des terreurs funestes pour les solliciter à la vertu que tout leur rend haïssable ou les détourner du mal que tout leur rend aimable & nécessaire. C’est ainsi que la politique & la superstition, à force de chimeres & d’intérêts fictifs prétendent suppléer aux mobiles réels & véritables que la nature, que l’expérience, qu’un gouvernement éclairé, que la loi, que l’instruction, que l’exemple, que des opinions raisonnables pourroient fournir aux hommes. Ceux-ci, entraînés par l’exemple, autorisés par l’usage, aveuglés par des passions non moins dangereuses que nécessai-