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méchant, non parce qu’il est né méchant, mais parce qu’on le rend tel ; les grands, les puissans écrasent impunément les indigens, les malheureux, & ceux-ci, au risque de leur vie, cherchent à leur rendre tout le mal qu’ils en ont reçu ; ils attaquent ouvertement ou en secret une patrie marâtre qui donne tout à quelques-uns de ses enfans & qui ôte tout aux autres ; ils la punissent de sa partialité & lui montrent que les mobiles empruntés de l’autre vie sont impuissans contre les passions & les fureurs qu’une administration corrompue a fait naître en celle-ci, & que la terreur des supplices de ce monde est elle-même trop foible contre la nécessité, contre des habitudes criminelles, contre une organisation dangereuse que l’éducation n’a point rectifiée.

En tout pays la morale des peuples est totalement négligée, & le gouvernement n’est occupé que du soin de les rendre timides & malheureux. L’homme est presque par-tout esclave, il faut donc qu’il soit bas, intéressé, dissimulé, sans honneur, en un mot qu’il ait les vices de son état. Par-tout on le trompe, on l’entretient dans l’ignorance, on l’empêche de cultiver sa raison ; il faut donc qu’il soit par-tout stupide, déraisonnable & méchant ; par-tout il voit que le crime & le vice sont honorés, il en conclud que le vice est un bien, & que la vertu ne peut être qu’un sacrifice de soi-même. Par-tout il est malheureux, ainsi

    mes ne sont si disposés à se nuire que parce que tout conspire à les diviser d’intérêts ; chacun vit, pour ainsi dire, isolé dans la société, & leurs chefs profitent de leurs divisions pour les subjuguer les uns par les autres : Divide & Impera est la maxime que suivent par instinct tous les mauvais gouvernemens. Les tyrans ne trouveroient pas leur compte s’ils n’avoient sent leurs ordres que des hommes vertueux.