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En effet la superstition prit plaisir à rendre l’homme lâche, crédule, pusillanime ; elle se fit un principe de l’affliger sans relâche ; elle se fit un devoir de redoubler pour lui les horreurs de la mort ; ingénieuse à le tourmenter, elle étendit ses inquiétudes au delà même de son existence connue, & ses ministres, pour disposer de lui plus sûrement en ce monde, inventèrent les régions de l’avenir, en se réservant le droit d’y faire récompenser les esclaves qui auront été soumis à leurs loix arbitraires, & de faire punir par la divinité ceux qui auront été rébelles à leurs volontés. Loin de consoler les mortels, loin de former la raison de l’homme, loin de lui apprendre à plier sous la main de la nécessité, la religion en mille contrées s’est efforcée de lui rendre la mort plus amère, d’appesantir son joug, d’orner son cortège d’une foule de phantômes hideux, & de rendre ses approches plus effrayantes qu’elle-même. C’est ainsi qu’elle est parvenue à remplir l’univers d’enthousiastes qu’elle séduit par des promesses vagues, & d’esclaves avilis qu’elle retient par la crainte des maux imaginaires dont leur fin sera suivie. Elle est venue à bout de leur persuader que leur vie actuelle n’est qu’un passage pour arriver à une vie plus importante. Le dogme insensé d’une vie future les empêche de s’occuper de leur vrai bonheur, de songer à perfectionner leurs institutions, leurs loix, leur morale & leurs sciences ; de vaines chimeres ont absorbé toute leur attention ; ils consentent à gémir sous la tyrannie religieuse & politique, à croupir dans l’erreur, à languir dans l’infortune, dans l’espoir d’être quelque jour plus heureux, dans la ferme confiance que leurs calamités & leur patience stupide les conduiront à une félicité sans fin ; ils se sont crus