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nous avons de la décence, de la vertu, de la justice, etc. Sont des suites nécessaires de notre tempérament modifié par la société où nous vivons ; les assassins & les voleurs, quand ils vivent entre eux n’ont ni honte ni remords.

Ainsi, je le répète, toutes les actions des hommes sont nécessaires ; celles qui sont toujours utiles, ou qui contribuent au bonheur réel & durable de notre espece s’appellent des vertus, & plaisent nécessairement à tous ceux qui les éprouvent, à moins que leurs passions ou leurs opinions fausses, ne les forcent à en juger d’une façon peu conforme à la nature des choses. Chacun agit & juge nécessairement d’après sa propre façon d’être, & d’après les idées vraies ou fausses qu’il s’est faites du bonheur. Il est des actions nécessaires que nous sommes forcés d’approuver ; il en est d’autres que nous sommes en dépit de nous-mêmes, forcés de blâmer, & dont l’idée nous oblige à rougir lorsque notre imagination fait que nous les voyons avec les yeux des autres. L’homme de bien & le méchant agissent par des motifs également nécessaires ; ils différent simplement pour l’organisation, & pour les idées qu’ils se font du bonheur ; nous aimons l’un nécessairement, & nous détestons l’autre par la même nécessité. La loi de notre nature voulant qu’un être sensible travaillât constamment à se conserver, n’a pu laisser aux hommes le pouvoir de choisir ou la liberté de préférer la douleur au plaisir, le vice à l’utilité, le crime à la vertu. C’est donc l’essence même de l’homme qui l’oblige à distinguer les actions avantageuses à lui-même de celles qui lui sont nuisibles.