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fauſſement fait regarder comme ſuſpects ; interrogeons la raiſon que l’on a honteuſemenr calomniée & dégradée ; contemplons attentivement le monde viſible, & voyons s’il ne ſuffit point pour nous faire juger des terres inconnues du monde intellectuel ; peut-être trouverons-nous que l’on n’a point eu de raiſons pour les diſtinguer, & que c’est ſans motifs que l’on a ſéparé deux empires qui ſont également du domaine de la nature.

L’univers, ce vaſte aſſemblage de tout ce qui exiſte, ne nous offre par-tout que de la matiere & du mouvement : ſon enſemble ne nous montre qu’une chaîne immenſe & non interrompue de cauſes & d’effets : quelques-unes de ces cauſes nous ſont connues parce qu’elles frappent immédiatement nos ſens ; d’autres nous ſont inconnues, parce qu’elles n’agiſſent ſur nous que par des effets ſouvent très éloignés de leurs premieres cauſes.

Des matieres très variées & combinées d’une infinité de façons reçoivent & communiquent ſans ceſſe des mouvements divers. Les différentes propriétés de ces matieres, leurs différentes combinaiſons, leurs façons d’agir ſi variées qui en ſont des ſuites néceſſaires, conſtituent pour nous les eſſences des êtres ; & c’eſt de ces eſſences diverſifiées que réſultent les différens ordres, rangs ou ſyſtêmes que ces êtres occupent, dont la ſomme totale fait ce que nous appellons la nature.

Ainsi la nature, dans ſa ſignification la plus étendue, eſt le grand tout qui réſulte de l’aſſemblage des différentes matieres, de leurs différentes combinaiſons, & des différens mouvemens que nous voyons dans l’univers. La nature, dans un