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maîtres de leurs volontés, toutes leurs institutions se fondent réellement sur la nécessité ; en cela comme en une infinité d’occasions la pratique s’écarte de la spéculation. En effet si l’on ne supposoit pas dans certains motifs que l’on présente aux hommes le pouvoir nécessaire pour déterminer leurs volontés, pour arrêter leurs passions, pour les diriger vers un but, pour les modifier, à quoi serviroit la parole ? Quel fruit pourroit-on se promettre de l’éducation, de la législation, de la morale, de la religion même ? Que fait l’éducation, sinon donner les premières impulsions aux volontés des hommes, leur faire contracter des habitudes, les forcer d’y persister, leur fournir des motifs vrais ou faux pour agir d’une certaine façon ? Quand un père menace son fils de le punir ou lui promet une récompense, n’est-il pas convaincu que ces choses agiront sur sa volonté ? Que fait la législation, si non de présenter aux citoyens dont une nation est composée des motifs qu’elle suppose nécessaires pour les déterminer à faire quelques actions & à s’abstenir de quelques autres ? Quel est l’objet de la morale si ce n’est de montrer aux hommes que leur intérêt exige qu’ils répriment leurs passions momentanées, en vue d’un bien-être plus durable & plus vrai que celui que leur procureroit la satisfaction passagère de leurs désirs ? La religion en tout pays ne suppose-t-elle pas le genre humain & la nature entière soumis aux volontés irrésistibles d’un être nécessaire, qui règle leur sort d’après les loix éternelles de sa sagesse immuable ? Ce dieu que les hommes adorent n’est-il pas le maître absolu de leurs destinées ? N’est-ce pas lui qui choisit & qui réprouve ? Les menaces & les promesses que la religion substitue aux vrais mobiles qu’une politi-