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que l’argent est le plus grand des biens, qu’il suffit pour rendre heureux ? Dans le pays que j’habite ne vois-je pas tous mes concitoyens avides de richesses & peu scrupuleux sur les moyens de se les procurer ? Dès qu’ils se sont enrichis par les voies que vous blâmez, ne sont-ils pas chéris, considérés, respectés ? De quel droit me défendez-vous donc d’amasser des trésors par les mêmes voies que je vois approuvées du souverain, tandis que vous les nommez sordides & criminelles ? Vous voulez donc que je renonce au bonheur ? Vous prétendez, dira le voluptueux, que je résiste à mes penchans ? Mais suis-je le maître de mon tempérament, qui sans cesse me sollicite au plaisir ? Vous apellez mes plaisirs honteux ? Mais dans la nation où je vis je vois les hommes les plus déréglés jouir souvent des rangs les plus distingués ; je ne vois rougir de l’adultère que l’époux qu’on outrage ; je vois des hommes faire trophée de leurs débauches & de leur libertinage. Vous me conseillez de mettre un frein à mes emportemens, dira l’homme colère, & de résister au désir de me venger ? Mais je ne puis vaincre ma nature ; & d’ailleurs dans la société je serois infailliblement deshonoré si je ne lavois dans le sang de mon semblable les injures que j’en reçois. Vous me recommandez la douceur & l’indulgence pour les opinions de mes pareils, me dira l’enthousiaste zélé ? Mais mon tempérament est violent ; j’aime très fortement mon dieu ; on m’assure que le zèle lui plaît, & que des persécuteurs inhumains & sanguinaires ont été ses amis ; je veux par les mêmes moyens me rendre agréable à ses yeux.

En un mot les actions des hommes ne sont ja-