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Les forces diverses & souvent compliquées qui agissent successivement ou simultanément sur le cerveau des hommes & qui les modifient si diversement dans les différens périodes de leur durée, sont les vraies causes de l’obscurité de la morale & des difficultés que nous trouvons, lorsque nous voulons démêler les ressorts cachés de leur conduite énigmatique. Le cœur de l’homme n’est un labyrinthe pour nous que parce que nous n’avons que rarement les données nécessaires pour le juger ; nous verrions alors que ses inconstances, ses inconséquences, la conduite bizarre ou inopinée que nous lui voyons tenir, ne sont que des effets des motifs qui déterminent successivement ses volontés, dépendent des variations fréquentes que sa machine éprouve, & sont des suites nécessaires des changemens qui s’opèrent en lui. D’après ces variations les mêmes motifs n’ont point toujours la même influence sur sa volonté, les mêmes objets n’ont plus le droit de lui plaire, son tempérament a changé pour un instant ou pour toujours ; il faut par conséquent que ses goûts, ses desirs, ses passions changent, & qu’il n’y ait point d’uniformité dans sa conduite, ni de certitude dans les effets que nous pouvons en attendre.

Le choix ne prouve aucunement la liberté de l’homme ; il ne délibère que lorsqu’il ne sçait encore lequel choisir entre plusieurs objets qui le remuent ; il est alors dans un embarras qui ne finit que lorsque sa volonté est décidée par l’idée de l’avantage plus grand qu’il croit trouver dans l’objet qu’il choisit ou dans l’action qu’il entreprend. D’où l’on voit que son choix est nécessaire, vû qu’il ne se détermineroit point pour un objet ou pour une action s’il ne croyoit y trouver quelque