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aussi nécessaires que celles des gens les plus prudens. Les motifs qui déterminent le voluptueux & le débauché à risquer leur santé sont aussi puissans, & leurs actions sont aussi nécessaires que ceux qui déterminent l’homme sage à ménager la sienne. Mais, insisterez-vous, l’on peut parvenir à engager un débauché à changer de conduite ; cela signifie, non qu’il est libre, mais que l’on peut trouver des motifs assez puissans pour anéantir l’effet de ceux qui agissoient auparavant sur lui, & pour lors ces nouveaux motifs détermineront sa volonté, aussi nécessairement que les premiers, à la conduite nouvelle qu’il tiendra.

Lorsque l’action de la volonté est suspendue, on dit que nous délibérons ; ce qui arrive lorsque deux motifs agissent alternativement sur nous. Délibérer ; c’est aimer & haïr alternativement ; c’est être successivement attiré & repoussé ; c’est être remué tantôt par un motif tantôt par un autre. Nous ne délibérons que lorsque nous ne conoissons point assez les qualités des objets qui nous remuent, ou lorsque l’expérience ne nous a point suffisamment appris les effets plus ou moins éloignés que nos actions produiront sur nous-mêmes. Je veux sortir pour prendre l’air, mais le tems est incertain ; je délibere en conséquence ; je pese les différens motifs qui poussent alternativement ma volonté à sortir ou à ne pas sortir ; je suis à la fin déterminé par le motif le plus probable, celui-ci me tire de mon indécision & il entraîne nécessairement ma volonté soit à sortir soit à rester : ce motif est toujours l’avantage présent ou éloigné que je trouve dans l’action à laquelle je me résous.