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avec l’ame. Ce qui paroit avoir donné le change à ceux qui ont soutenu que l’ame tiroit ses idées d’elle-même, c’est qu’ils ont regardé ces idées comme des êtres réels, tandis que ce ne sont que des modifications produites en nous par des objets étrangers à notre cerveau ; ce sont ces objets qui sont les vrais modeles ou les archétypes auxquels il falloit remonter ; voilà la source de leurs erreurs.

Dans l’homme qui rêve l’ame n’agit pas plus par elle-même que dans l’homme ivre, c’est-à-dire modifié par quelque liqueur spiritueuse ; ou que dans le malade en délire, c’est-à-dire modifié par des causes physiques qui troublent sa machine dans ses fonctions ; ou enfin que dans celui dont la cervelle est dérangée ; les rêves, ainsi que ces différens états, n’annoncent qu’un désordre physique dans la machine humaine, d’après lequel le cerveau n’agit point d’une façon régulière & précise : ce désordre est dû à des causes physiques telles que des alimens, des humeurs, des combinaisons, des fermentations peu analogues à l’état salubre de l’homme, dont le cerveau est nécessairement troublé, dès que son corps est agité d’une façon extraordinaire.

Ainsi ne croyons point que notre ame agisse d’elle-même ou sans cause dans aucun des instans de notre durée : elle est conjointement avec notre corps soumise aux impressions des êtres qui agissent en nous nécessairement & d’après leurs propriétés. Le vin pris en trop grande quantité trouble nécessairement nos idées & met le désordre dans nos fonctions corporelles & intellectuelles.