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changer ou perfectionner ſa façon d’être & pour la rendre plus heureuſe, ne fut jamais qu’une conséquence néceſſaire de l’eſſence propre de l’homme & de celle des êtres qui agiſſent ſur lui. Toutes nos inſtitutions, nos réflexions, nos connoiſſances n’ont pour objet que de nous procurer un bonheur vers lequel notre propre nature nous force de tendre ſans ceſſe. Tout ce que nous faiſons ou penſons, tout ce que nous ſommes & ce que nous ſerons n’eſt jamais qu’une ſuite de ce que la nature univerſelle nous a faits : toutes nos idées, nos volontés, nos actions ſont des effets néceſſaires de l’eſſence & des qualités que cette nature a miſes en nous, & des circonſtances par lesquelles elle nous oblige de paſſer & d’être modifiés. En un mot, L’ART n’eſt que la Nature agissante à l’aide des inſtrumens qu’elle a faits.

La nature envoie l’homme nud & deſtitué de ſecours dans ce monde qui doit être ſon ſéjour ; bientôt il parvient à ſe vêtir de peau ; peu à peu nous le voyons filer l’or & la ſoie. Pour un être élevé au deſſus de notre globe, & qui du haut de l’atmoſphere contempleroit l’eſpèce humaine avec tous ſes progrès & changemens, les hommes ne paroitroient pas moins ſoumis aux loix de la nature lorſqu’ils errent tout nuds dans les forêts, pour y chercher péniblement leur nourriture, que lorſque vivant dans des ſociétés civilisées, c’eſt-à-dire enrichies d’un plus grand nombre d’expériences, & finiſſant par ſe plonger dans le luxe ils inventent de jour en jour mille beſoins nouveaux & découvrent mille moyens de les ſatisfaire. Tous les pas que nous faiſons pour modifier notre être ne peuvent être regardés que comme une longue ſuite de cauſes & d’effets, qui ne ſont